
Frelon asiatique : enquête au cœur d’une menace invisible
Sur les routes du sud-Vienne, les arbres se balancent sous le vent d’automne. Rien ne laisse deviner que, perchés à plusieurs mètres de hauteur, se cachent parfois des ennemis discrets mais redoutables : les frelons asiatiques.
En quelques années, ils ont colonisé la région et bouleversé le quotidien des habitants, des éleveurs, des chasseurs et des passionnés d’animaux.

Une menace silencieuse dans nos jardins
Lucie, habitante d’Availles-Limouzine.
Devant sa maison, son chien Lasko joue dans l’allée, mais la cicatrice sur son museau rappelle un souvenir douloureux.
« On ne voit rien venir, tout se passe en quelques secondes », raconte-t-elle. « Le nid était caché dans le laurier. Lasko est passé devant et il s’est fait attaquer aussitôt. »
Elle se souvient encore du gonflement rapide, de l’urgence vétérinaire et de la peur qui a suivi.
Depuis, Lucie inspecte chaque recoin de son jardin.
Au cœur des élevages : des poulaillers sous pression
Chez Jean-Paul, éleveur amateur de volailles.
Dans son poulailler rénové, les poules picorent paisiblement. Pourtant, il n’y a pas si longtemps, elles vivaient dans la terreur.
« Les frelons tournaient autour de l’abreuvoir, les poules refusaient de sortir. Le nid sous le toit faisait bien 60 cm », explique-t-il.
« J’ai immédiatement appelé un professionnel. Depuis, je piège au printemps, sinon ils reviennent. »
Le témoignage est clair : un nid peut paralyser tout un élevage.
Témoignage du Sud-Vienne : "Dans les champs, on en voit de plus en plus"
Marc, un agriculteur habitué des grands espaces.
Dans son tracteur, il observe souvent ce que beaucoup ne remarquent pas : les nids, parfois très hauts dans les arbres, parfois étonnamment proches du sol.
« On en voit beaucoup plus qu’avant, surtout en bordure des champs », confie-t-il.
« Pendant les moissons, les frelons sont attirés par les insectes que les machines dérangent. J’ai dû éloigner mes chiens plusieurs fois. Il suffit qu’ils mettent la truffe au mauvais endroit… et c’est la catastrophe. »
Marc nous montre un vieux chêne au fond de sa parcelle. Là, accroché à cinq mètres de hauteur, un nid sphérique, désormais vide, témoigne de la saison passée.
« Celui-là, je ne l’avais même pas vu avant l’hiver. Franchement, c’est devenu un vrai problème dans tout le Sud-Vienne. »
Un danger pour la biodiversité
En suivant un spécialiste de la désinsectisation, nous découvrons la puissance de ces colonies.
Un nid peut abriter plusieurs milliers d’individus, capables de décimer des ruches entières.
« Pour les abeilles, c’est dramatique », nous explique le technicien. « Un nid peut faire disparaître des milliers d’abeilles chaque jour. »
Que faire si vous repérez un nid ?
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Ne jamais intervenir soi-même.
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Éloigner les animaux immédiatement.
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Contactez un professionnel ou la mairie si le nid est en zone publique.
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Surveiller particulièrement en fin d’été, période d’activité maximale.
Comment protéger vos animaux ?
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Inspecter les jardins, haies, toitures, dépendances.
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Observer le comportement des chiens et chats.
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Installer des pièges sélectifs au printemps.
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Encourager les oiseaux prédateurs comme les mésanges.
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En cas de piqûre : vétérinaire en urgence, surtout si le museau ou la gorge est touché.
Une bataille qui concerne toute la ruralité
À Availles-Limouzine, L’Isle-Jourdain, Luchapt, Mauprévoir, Asnières-sur-Blour et bien d’autres communes du sud-Vienne, tous dressent le même constat :
le frelon asiatique progresse vite, très vite.
Mais la vigilance collective, les pièges au bon moment et les interventions professionnelles permettent de limiter la menace.
La lutte continue, et chacun peut y contribuer.
Philippe Muzohmalin
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